Mémoire sur la constitution physique d'Égypte / [Déodat de Dolomieu].

Dolomieu, Déodat de, 1750-1801.

Date:: [1793]

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Credit: Mémoire sur la constitution physique d'Égypte / [Déodat de Dolomieu]. Source: Wellcome Collection.

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(O Feiunif l’ancienne Arjlnoé, & ici même, c’eft plutôt un écart que fait: la montagne de Lybie pour contourner l’ancien baftin du lac Moeris 9 que ce n’eft une véritable folution de continuité. La vallée de la haute-Egypte fe termine par la féparation fubite des deux chaînes de montagnes qui l’ont conduite depuis le 23e degré yo minutes de latitude jufqu’au 30e degré. On peut même dire que la chaîne arabique celle pour lors, car elle eft comme coupée, fes efcarpemens tournent tout-à-coup pour préfenter leur afped au nord , & après avoir embraffé l’emplacement de la nouvelle capitale de l’Egypte, le Caire , ils fe prolongent un peu vers le nord-eft avant de fe détourner encore une fois pour gagner le rivage de la mer Rouge. La chaîne libyque, chargée depuis des milliers d’années du poids des pyramides, monumens de la puiflance & de la vanité des rois d’Egypte , décline vers le nord- oueft *, elle s’abaifTe enfuite graduellement, 6c fe termine enfin en arri¬ vant à la pointe occidentale du badin qu’occupoit l’ancien lac Mareotis par de petites collines fabioneufes qui ont à leurs pieds plufieurs lacs de natrum. La vafte plaine renfermée dans cette efpèce de golfe qui fuccède à la longue vallée, & qui embrafle une érendue de plus de quatre-vingts lieues de large, conftitue la baffe-Egypte ou l’Egypte proprement dite. L’ac- croifTement progreflîf de cette plaine, fon empiétement journalierfur la Méditerranée , fon peu d’élévation au-deffus du niveau de la mer & fa parfaite horifontalité ont bientôt fait naître l’opinion qu’elle étoit une conquête de la terre fur le domaine des eaux , 5c l’Egypte paroîc avoir été le premier pays qui ait donné l’idée de la tranfmutation de la mer en terre. Hérodote 6c après lui Diodore de Sicile, Ariftote, Strabon , Senèque , Pline , Plutarque, ainfi que tous les autres écrivains de l’antiquité, ont regardé l’Egypte comme une terre nouvelle, comme un préfent du Nil (1). Telle étoit la doétrine des Prêtres de Memphis 6c de Thèbes; telle a été l’opinion de tous ceux qui ont obfervé la confti- tution phyfique de cette fingulière contrée; tel eft encore le fentiment de tous les voyageurs modernes qui ont vifité ce pays des merveilles. Je fuis loin de combattre dans fa totalité un préjugé fi ancien , fi vrai- femblable, fi univerfel. Je fuis bien loin de douter du progrès confidé- rable des atterriffemens du Nil & des effets qu’ils ont produits ; mais je (1) Ce que me difoient les prêtres de l'Egypte me paroît fort raifonnable (dit Hérodote, liv. 1 , §. * ), tout homme judicieux qui n'en a point entendu parler auparavant remarquera en le voyant que l'Egypte où abordent les Grecs ( la baffe-Egypte ) , efl une terre de nouvelle acquifition , & un préfent du fleuve. On portera auffi le même jugement de tout le pays qui s'étend au-dejfus du lac Moeris jufqu'â trois journées de navigation. Tous les auteurs de l’antiquité ont copié Hérodote, oy ont exprimé par d’autres termes la même opinion.