Histoire de la botanique et plan des familles naturelles des plantes.
- Adanson, Michel, 1727-1806.
- Date:
- 1864
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Credit: Histoire de la botanique et plan des familles naturelles des plantes. Source: Wellcome Collection.
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![Il paraît donc suffisamment prouvé par les faits cités ci-dessus, cjue l’art, la culture et encore plus le hasard, c’est-à-dire certaines circonstances inconnues, font naître, tous les jours, des variétés dans les fleurs curieuses, telles que les Tulipes, les Anémones, les Renon- cules, etc., qui ne méritent pas de changer les espèces. /|59.—[Il suit donc de l’exposé ci-dessus 1° que tous les exemples cités jusqu’ici comme des changements d’espèces ou comme des formations do nouvelles races constantes ne sont que des variétés ou des monstruosités; 2° que l’examen de ces sortes de changements exige la i)lus grande attention et même une sagacité, une justesse d'esprit et des connaissances a^sez pro- fondes pour être appréciées à sa juste valeur et pour faire éviter les inconséquences sortant de tant d’opinions et d’erreurs; car un fait mal apprécié, mal jugé et le même fait mal vu con- duisent également à des conséquences fausses, puisque la Linaire Péloriée aperçue et nommée monstrueuse par M. Linnæus, l’a conduit à admettre la transmutation des espèces, comme le Fraisier monstrueux à une feuille, apprécié comme une production régulière et constante, a conduit son observateur à embrasser la même opinion sous un terme différent; 3 que si l’ex- posé de tous ces faits nous eût été présenté avec cette vérité, s’il nous eût été permis de croire qu’un botaniste de 1a célébrité, du rang qu’occupe M. Linnæus eût pu se tromper et nous induire en erreur, nous n’aurions certainement pas admis aussi légèrement que lui et avec autant de bonne foi la transmutation des espèces. 160. —En conséquence, si la recherche delà vérité nous a exposé à admettre le changement des espèces fondé non pas sur la seule opinion d'un botaniste tel que M. Linnæus dont la célé- brité n’est ici qu’un vain titre, mais sur les faits qu’il nous a donnés comme vrais et comme constants dans les apparences, si nous avons été trompé par le rapport d’autres, si nous avons tiré des conséquences justes de faits faux et par conséquent des inductions fausses, le même esprit de vérité, après avoir vu par nous-mème, apprécié, jugé et reconnu la fausseté de ces faits, doit nous faite tirer des conclusions directement opposées et nous porter à dire que la transmutation des espèces n’a pas lieu dans les plantes non plus que dans les animaux, et (ju’on n’en a pas de preuve directe même dans les minéraux, en suivant le principe reçu que la constance est essentielle pour déterminer une espèce; et par conséquent un métal, par exemple l’or, qui par des manipulations ou naturellement se transformerait en argent, lequel pourrait redevenir or, n’établirait par là qu’une seule espèce entre l’or et l’argent, de sorte que l’un serait une variété de l’autre; mais si de l’or seul ou de l’argent seul venait à produire par une manipulation constante un autre métal nouveau qui se montrerait constamment de même, ce serait alors un changement d’espèce; et nous croyons qu’aucun naturaliste instruit ne sera tenté d’admettre qu’il se soit encore fait un pareil changement d’espèce.] 161. —De là la difficulté de définir quels sont les corps primitifs de la création, quels sont ceux qui, par la succession de la reproduction, ont pu être changés par des causes accidentelles. C’est sans doute pour cela qu’on ne retrouve plus aujourd’hui nombre de plantes décrites par les anciens botanistes; elles auront disparu, soit en rentrant dans leur état primitif, soit en changeant de forme pour multiplier les variétés. A ce compte les anciens n’auraient pas eu tort de décrire si peu de plantes d’un même genre; ils n’en connaissaient pas davan- tage, et c’est le temps qui en a amené de nouvelles. Par la même raison les botanistes futurs seraient accablés et obligés à la fin d’abandonner les variétés pour se réduire aux espèces et genres seuls. Mais avant que de prévoir ce qui sera, il faut se bien assurer de ce qui est. 162. —S’il est vrai, comme l’expérience le prouve, et comme nous l'avons démontré plus haut, que lesgenres varient comme les méthodes, c’est-à-dire suivant les principes des diverses mé- thodes, il n’est pas douteux que les espèces qui dépendent de ces genres, ou qui les forment, doivent être sujettes aux mêmes changements. Car si deux genres sont réunis dans une mé- thode, ou si un seul est divisé en deux, alors les espèces changent d’ordre, d’arrangement et de genre; par exemple, si l’on réunit, comme j’ai fait, le Melongena et le Mandragora avec \e Solanum, cela change nécessairement la disposition des espèces dans ce genre; si au con- traire on distingue avec moi, le Scilla de VOrnithogalum, nombre d’espèces auront changé de genre. De sorte que, comme il n’a paru jusqu’ici aucune méthode naturelle, et par consé- quent fixe, on peut dire que les classes, les genres et les espèces n’ont pas encore la stabilité qu’exige cette science bien épurée, quoique les botanistes modernes ne cessent de se flatter](https://iiif.wellcomecollection.org/image/b24863890_0103.jp2/full/800%2C/0/default.jpg)