Volume 1
Dictionnaire royal, françois-anglois et anglois-françois / [Abel Boyer].
- Abel Boyer
- Date:
- 1752
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Credit: Dictionnaire royal, françois-anglois et anglois-françois / [Abel Boyer]. Source: Wellcome Collection.
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![i6 DISSERT à l’Auteur,j’en veux uniquement à notre poëfie. Dans Y Andromaque Ad. II. 2. je trouve deux ïambes qui tiennent la place de deux Spondées : Ou ne dois-je imputer quà votre feul [devoir], Uheureux emprejjement qui vous porte à [me] voir ? je pourrois multiplier ces exemples à l’infini ; mais ce¬ la lüffit pour vous indiquer les défauts de notre Parnaf- fe, Sc pour vous prouver ce que j’ai avancé, que nos fyllabes y font comptées & nullement pefées. Quel efl celui de nos accents François, qui vous embarraflé le plus ? A. „ La grande difficulté qui me relie ne regarde 5, que Yé fermé : le grave & le circonflexe ne tombant „ que fur la derniere, ou fur la pénultième, il efb aifé „ de s’en appercevoir ; &c d’ailleurs on ne manque gue- „ re à le placer où il faut : mais à l’égard de Ye fémi- „ nin & du Mafculin, comme nos Livres font pref- „ que tous fautifs là-deffus, comment ferai-je, moi, „ qui n’ai point vécu à Paris, ni fur les bords de la 3, Loire j pour les dillinguer ? Je vois tous les jours „ d’habiles gens qui en difputent. Ne vous ai-je pas 3, ouï dire à vous-même, que feu Monf. la Touche, „ votre illuftre Maître, quoique vous ne Bayiez ja- „ mais vu, fut obligé d’écrire à Paris pour confulter 3, des Académiciens fur quelques é difficiles, qu’on pré- 3, tendoit qu’il n’avoic pas bien accentués ? B. J’ai eu quelque tems entre les mains l’original de cette confulte Grammaticale, avec la Réponfe e regio- ne de Mrs. les Abbés de Dangeau & Tallement, tous deux de l’Académie, ôc j’ai eu foin d’en tirer un ex¬ trait pour mon inftruétion particulière , que je vous communiquerai en tems & lieu. Le meilleur confeil que je puiffe vous donner, en attendant, fur cet article, c’efl: de vous attacher aux auteurs qui ont veillé à la ponctuation & à la correction de leurs Ouvrages. Et entre ceux-là je ne puis me dilpenfer de vous nommer ce même Mr. la Touche, dont la Science Grammati¬ cale n’a été conteftée de perfonne, & néanmoins c’é • toit le moindre des attributs de ce vertueux Exilé. Sa Grammaire (a) s’eft imprimée fi fourent & répandue avec tant de fuccès, que le P. Buffier lui-même, tout habile qu’il étoit, n’a pû lui refufer de juftes éloges. Je joins à Mr. la Touche fon généreux Approbateur. A- joutez-y Mr. Refaut, qui vient de nous donner la 5e. Edition de fon exacte Grammaire : Ne négligez pas non plus le N. Teftament de Berlin.- Mais fur-tout n’oubliez pas l’excellent Abbé $ Olivet : mocquez vous des railleries dont le Cauflique des Fontaines a préten¬ du abimer fes remarques fur Racine. Il s’agit ici des Accents:, or dans toutes les productions de l’Académi¬ cien , qui ne font pas en petit nombre, il n’y a pas un accent, à mon avis, qui foit marqué de travers. Ses Philippiques & fes Catilinaires de la derniere Edition, entr’autres, font un bijou en ce genre, que vous ne de¬ vez pas vous refufer. Mais comme vous pourriez m’objecter, que ces livres ne contiennent pas tous nos. mots, en voici un qui vous fervira de Répertoire com¬ plet à cet égard; C’efl le Billionaire de Danet, Fran¬ çois-Latin , livre d’ailleurs fl néceffaire, où vous trou- fa) VArt de bien parler François, en a Tomes A T I O N fur la verez la déciflon de tous les cas, puifqu’il renferme ir* niverfellement tous nos termes bien accentués. Il eft vrai que l’ayant compofé pour le tems où il vivoit &c pour les Enfans, il n’a pas cru devoir fupprimer les s inutiles; mais à chaque mot tant foit peu feabreux, il avertit de la vraye prononciation : ce qui fuffit à vos befoins. III. DE LA QUANTITE'. A. „ J’entend ; mais la Quantité qui a tant de rap- „ port à la Profodie, comment la règlerons-nous ? B. Mr. L’Abbé d’Olivet a déjà traité cette matiè¬ re , & parcouru avec beaucoup d’exa&itude les diffé¬ rentes terminaifons de nos Syllabes, en affignant à cha¬ cune ou la longueur, ou la brièveté, ou Yentre-deux, qui leur convient : vous n’attendez pas de moi, que je vous tranferive ici tout cela? A. „ Non, mais comme fur la profodie vous m’a- ,, vez communiqué des ouvertures qui me font nou- ,, velles, donnez - moi auffi fur la quantité quelques ,, idées générales, quejepuilfe retenir facilement. B. Les Latins & les Grecs ont partagé leurs fyllabes en longues &c breves, felon le befoin qu’ils en avoient dans leur Poëfie; mais pour Nous, qui nepéfbns pas les nôtres, nous pouvons lesenvifager fous une répar¬ tition plus nombreufe. Il me lèmble donc que nous avons quatre ou cinq fortes de Syllabes ; des fyllabes [impies & des fyllabes compofées ; des fyllabes longues Sc des fyllabes breves, & enfin des fyllabes, qu’on me permettra de nommer brévijfimes ; ce font nos e féminins, lorfqu’ils termi¬ nent le mot. Je nomme ici Profodiquement une Syllabe [impie celle qui par fa nature, ou par fa conflruélion n’exige aucun effort de voix , & telles font toutes celles qui font terminées par la voyelle même qui en modifie le fon, fans accent grave , ou circonflexe , comme par exemple, ba, bé, bi, bo, bu, ga, gui, gui, go, gu ; ÔC autres femblables , foit qu’elles commencent par une confonne, ou par deux conformes ou par une Ample voyelle : comme a-yant, a-yez, avoir, lavoir ,razoir, manoir, néant, tirant, logeant, créant, préaux , pré¬ vient, travers, frier, trier, broyer j Je les nommefm~ pies par la conftruétion, parce que la voyelle unique qui les forme dans plufieurs mots, ou la confonne ou les deux confonnes qui les commencent, ne les ren¬ dent ni plus longues, ni plus courtes. Ainfi je comp¬ te comme [impies toutes ces premieres Syllabes, qui n’exigent ni effort de voix, ni appui fenfible, comme Ado-am, Ama-leck, Abimé-leck, Ama-ranthe, Ra- va-nel, ana-theme, étudi-er, péné-trer, g^-rentir, lou- voyer, gué-rir, gé-xzs, fa-né, tou ché, &c une infi¬ nité d’autres femblables. Généralement toutes ces fyl¬ labes font affiez courtes; excepté celles qui font mar¬ quées d’un accent aigu , defquelles on peut faire une claffe particulière, & les confldérer fl l’on veut com¬ me moyennes, c’eft-à-dire, ni trop longues, ni trop breves. Car fl elles étoient longues, elles fêroient éga¬ les à nos e graves ôc à nos ê circonflexes, ce quicon- fop- Edit, à Amfl.](https://iiif.wellcomecollection.org/image/b30414763_0001_0022.jp2/full/800%2C/0/default.jpg)